perspectives et propositions pour une didactique du français dans tous ses états

Le domaine de la didactique du français1 est, depuis des décennies, divisé, on le sait, en deux grandes propriétés respectivement dénommées français langue maternelle (dorénavant FLM) et français langue étrangère, cette der- nière voisinant depuis quelque temps déjà avec français langue seconde (dorénavant FLE/FLS)2. Parler de « propriétés » n’est pas seulement une image, tant il est vrai que les préoccupations institutionnelles de délimitation de territoire l’ont pendant longtemps emporté sur les aspects épisté- mologiques.

Il s’agira d’examiner ici quelques-unes des conditions dans lesquelles ces différents domaines pourraient s’articuler au sein d’une même discipline de recherche, la didactique du français, elle-même sous-ensemble de la didacti- que des langues.

À cette fin, il ne me paraît pas inutile de rappeler, ne serait-ce que de façon cavalière et pour mémoire, quelques étapes dans la constitution (ou des ten- tatives de constitution) de leurs modèles respectifs au cours de ces dernières années. 

Les années 1980-1990 ont été fertiles en mises en perspective historique : dans le domaine du FLE/FLS en témoigne la création en 1988 de la Société Internationale pour l’Histoire du français langue étrangère ou seconde (SIH- FLES). Les travaux de Sophie Moirand (1988), Daniel Coste (1987, 1994), Christian Puren (1988), et, dans le domaine du FLM, les recherches menées au sein de l’Institut national de recherche pédagogique (INRP), en particulier dans les équipes pilotées par Hélène Romian ou Jean-Claude Chevalier et, plus récemment, les travaux, colloques et publications de l’Association pour le développement de la recherche en didactique du français langue mater- nelle (DFLM)3, sont autant d’entreprises d’envergure qui permettent aux cher- cheurs d’aujourd’hui de se situer dans une évolution en tenant compte des acquis.

Il est vrai que ces mises en perspective se sont construites, la plupart du temps, séparément, comme si DFLM et DFLE/FLS constituaient deux territoi- res ne souffrant aucune incursion, pas même de frontaliers. Il est vrai aussi qu’il fallait mettre d’abord en lumière leurs spécificités pour éviter tout amal- game et sortir définitivement de l’époque où enseigner le français ici ou ailleurs était considéré comme une seule et même entreprise.

De ce point de vue, peu de choses ont changé : les spécificités demeurent, très fortes. Il est cependant devenu possible de ne pas les rigidifier dans des oppositions irréductibles et de reparcourir ces deux territoires en se plaçant du point de vue de la diversité des situations d’enseignement-apprentissage.

Pour éclairer l’histoire des relations entre la DFLM et la DFLE/FLS, on peut prendre, de façon partielle et sûrement partiale4, quelques points de repères, dans les trente dernières années en France5, en privilégiant ceux qui ont une valeur épistémologique et qui attestent des tentatives de modélisation et de structuration disciplinaires. Une approche externe, fondée sur les indicateurs que constituent quelques formalisations visibles du champ (les schémas et modèles6) dans les années 1970, puis au cours de la décennie 80 et jusqu’à aujourd’hui, fournit des pistes de réflexion fécondes. Étant entendu que le champ disciplinaire se construit aussi à travers l’ensemble des discours des didacticiens7 et pas seulement dans les tentatives de modélisation qu’en ont proposées certains auteurs.

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